Trois jours après les élections européennes, nous voulons, en tant qu’association dont les valeurs correspondent à celles de l’idée de l’UE, faire un bilan bref et envisager la prochaine législature. Il s’agit maintenant d’analyser les raisons d’un tel glissement vers la droite et de se confronter à la réalité et à l’état actuel de l’UE.
Les élections de 2019 sont apparues avant tout comme des « élections climatiques ». Par rapport à la législature précédente, le groupe Verts/ALE a perdu près de 20 sièges. Depuis cette campagne, les sujets de la candidature ont pris un virage à 180 degrés. En 2020, la pandémie de Corona a commencé, en 2022, la guerre en Ukraine. De tout autres sujets sont désormais à l’ordre du jour des parlements. Et par rapport à 2019, l’extrême droite a connu une immense progression. Alors que le groupe conservateur du PPE progresse fortement et se renforce, les deux groupes d’extrême droite ID et ECR ont gagné au total plus de 10 sièges. Le nombre de représentants critiques envers l’UE au sein du nouveau Parlement a donc augmenté.
Les liens de cause à effet entre la thématique politique et les résultats des élections du 9 juin sont très clairs. Cela est particulièrement visible dans les pays fondateurs de l’UE. Les citoyens se sentent trahis ou méprisés. Prenons d’abord la France. Le situation politique montre que les « erreurs » du gouvernement ont poussé les électeurs à voter les partis d’opposition lors de ces élections. Déjà en 2023, après la réforme des retraites controversée, on avait prévenu que la politique de Macron inciterait les électeurs à se tourner vers le Rassemblement national. On observe un phénomène similaire en Allemagne : la gestion de la guerre en Ukraine et de l’inflation par le gouvernement allemand a renforcé les partis d’opposition. Plusieurs gouvernements sont désormais confrontés à une légitimité affaiblie.
Ces observations nationales sont indispensables pour l’analyse des élections européennes. On pourrait faire des remarques similaires pour d’autres États membres de l’UE ; cette tendance est commune à plusieurs pays. Par exemple, en Italie, le taux de chômage élevé et les crises politiques ont renforcé les mouvements populistes. En Espagne, la gestion des tensions en Catalogne et les questions économiques ont favorisé l’essor des partis d’opposition. En Pologne et en Hongrie, les tensions avec l’UE sur l’État de droit ont également influencé les comportements électoraux. Les cinq dernières années ont été tellement marquées par des crises externes et internes que le comportement électoral et la conception de la démocratie se modifient durablement. Ce qui s’est passé en politique intérieure au cours des dernières années se reflète directement dans les résultats des élections européennes.
Les médias sociaux jouent ici un rôle important. Dans les jeunes générations surtout, on s’informe aujourd’hui uniquement via TikTok et Instagram. De nombreux politiciens (principalement les populistes et l’extrême droite) ont pris le train en marche et ont saisi leur chance. C’est pourquoi, en Allemagne par exemple, l’AfD, parti d’extrême droite, connaît un tel succès auprès des jeunes de 16 à 24 ans, affichant un plus de 11 %.
On ne peut plus ignorer la montée de l’euroscepticisme, surtout chez les jeunes Européens. En tant qu’association qui défend l’idée d’une Europe unie, cela nous fait beaucoup de peine et nous essayons de toutes nos forces, avec nos projets, de contribuer à renforcer l’Europe unie.
Ce qu’il faut maintenant, c’est observer les réunions des nouveaux députés élus qui auront lieu du 16 au 19 juillet et les formations de groupes qui suivront. L’UE est en train de se réorienter et de nombreuses questions restent encore sans réponse.
En tant que Maison de l’Europe Strasbourg-Alsace, nous voulons saisir cette opportunité de réorientation et rendre les valeurs européennes plus sociétales. Nous nous engageons jour après jour pour que l’UE et ses valeurs, pour lesquelles nous restons passionnés, perdurent.